Article fait le 15 février 2014.
Tout a commencé pour lui un beau jour de 1946, Claude ANDRÉ découvrait le patinage sur roulettes à Paris. Il a bien voulu nous raconter son histoire et nous dire comment dans la capitale, il était possible à lʼépoque de faire du rink hockey et de la course.
Souvenirs de Roulettes : Bonjour Claude, merci dʼavoir eu la gentillesse dʼaccepter cette petite interview pour « Souvenirs de Roulettes ». Pouvez-vous vous présenter et nous dire quand, où et comment avez-vous découvert la pratique du patinage sur roulettes?
Claude ANDRÉ : Je mʼappelle ANDRÉ Claude et jʼai 79 ans. Cʼest en 1946 au Jardin des TUILERIES à lʼâge de 11 ans que jʼai chaussé mes premiers patins (roues fer, axe fixe, fixation aux chaussures par courroies). En 1948 je pris lʼhabitude dʼaller patiner au TROCADERO et lorsque les agents de police nous chassaient nous nous rabattions au Palais de TOKIO. En 1949 cʼest à cet endroit que je fus contacté par des dirigeants du Paris Hockey Club, quelques temps après jʼentrais dans le monde de la compétition.
S de R : A cette époque ce sport était-il beaucoup pratiqué ?
CA : Oui, à Paris intra muros il y avait six clubs qui pratiquaient le rink (les Diables bleus de Paris, lʼA. S. O 10e, le P.H.C, le Roller Hockey Club, Le Roller Olympique du 14e, le Cercle des Patineurs Parisiens, plus un club en périphérie Lʼ A.S. Drancy.
S de R : Y-avaitʼ il à Paris un lieu, un endroit où les gens se retrouvaient pour la pratique du patinage sur roulettes ? CA : Pour le public il existait une patinoire avec bar, musique, location de patins, atelier de réparations, bref une vrai patinoire qui était située 13 rue de LANCRY. Les clubs y avaient accès moyennant une cotisation. Autrement pour la compétition nous avions accès au CARREAU du TEMPLE et au Gymnase JAPY.
Gymnase du Carreau du Temple
Gymnase JAPY Paris 11ème
S de R : Quel type de matériel utilisiez-vous ? CA : Tout à fait au début des patins SPEEDY roues aluminium et bois (buis) puis patins MIDONN roues bois. Ces patins étaient construits en fer (platine, ponts et supports ponts), le roulement sʼeffectuait avec un ensemble cône, cuvette, billes. En 1955 Henri HERMANN me confia pour essai des patins de course de sa fabrication. Ces patins révolutionnaires à lʼépoque car construits en alliage dʼaviation (fortal) avec pour la première fois des roues montées sur roulements S.K.F. La légèreté et la glisse obtenue avec ces patins me permirent de remporter les championnats dʼile de France sur route 1955 vitesse et fond, bientôt toute lʼélite de la course française sʼéquipa avec les patins «HERMANN ».Je continue à patiner avec ces mêmes patins. Jʼai été champion de Paris vitesse et fond cadet, junior et senior. Appelé sous les drapeaux fin 1955, je pars en Algérie pendant 19 mois cette absence fut un sérieux handicap pour retrouver le haut niveau.
Les fameux patins HERMAN 1954
S de R : Pratiquait-on plus le hockey ou la course ? CA : Pour la plupart des patineurs nous faisions les deux, il arrivait très fréquemment dans une même réunion de disputer une course et un match de hockey à la suite. Du reste en observant les noms des coureurs et des hockeyeurs de 1950 à 1970 on sʼaperçoit que ce sont les mêmes la plupart du temps. Par la suite progressivement la spécialisation est venue.
S de R : Y avait-il beaucoup de clubs ? Et dans quel quartier de Paris ?
CA : Six, quatre dans le 10è, un dans le 14è, un dans le 18ème.
S de R : La plupart du temps à cette époque on faisait du hockey lʼhiver et le printemps venu on pratiquait la course, pouvez-vous Claude nous dire un peu comment ça se passait ? CA : Dans mes souvenirs il nʼy avait pas de saison spécifique, lʼhiver nous courrions sur piste et aux beaux jours sur route .Nous jouions au hockey lʼhiver et lʼété ; par exemple il mʼest arrivé dʼaller disputer un tournoi international à KNOKKE ZOUTE en Belgique et redescendre en voiture à GUJAN MESTRAS pour disputer les championnats de France route au mois dʼaout.
S de R : Jean Luc BEDOUET, ami et Président des arbitres, mʼavait transmis des photos dʼéquipe des années 50 et 60 et aussi parmi les vôtres, jʼai vu que vous aviez joué dans plusieurs clubs. Quel a été votre parcours de hockeyeur et dans quels les clubs avez-vous joué ? CA : 1949 à 1954 Paris Hockey Club- 1955 à 1965 Cercle des Patineurs Parisiens – 1966 à 1970 Roller Olympique 14è – 1971 à 1978 Paris Hockey Club.
S de R : Vous avez joué avec le père de Jean Luc, puis avec lui, vous avez eu comme coéquipier PALANCA et GRANIER que jʼai aussi la chance de rencontrer en compétition à mes débuts de gardien de but lorsque je jouais à lʼASTA à lʼépoque, avez-vous quelques souvenirs particuliers avec tous ces joueurs ? CA : Surtout des souvenirs dʼintense camaraderie qui nous a permis dʼaccéder au meilleur niveau du rink français : la N1. Après avoir battu COUTRAS en finale excellence 1959 par 5-0 avec le C.P.P nous avons accéder à la N1. La suite fut plus dure car notre maitre à jouer Marcel SERVAN nous quitta pour retrouver son club lʼA.S.P.T.T de Bordeaux, José PALANCA le remplaça mais ne le fit pas oublier.
S de R : Quels souvenirs marquants ou amusants gardez-vous de cette époque ? CA : Souvenirs de courage et dʼabnégation car à cette époque comme nous étions tous des garçons qui travaillaient en usine avec des journées de travail de 9h50 plus le samedi matin ce qui faisait des semaines de plus de 50h, il fallait aimer le rink pour sʼentrainer 3 fois par semaine le soir jusqu'à 23 h et jouer ou courir le week-end.
S de R : Un joueur vous a-t-il marqué plus particulièrement ? CA : Il y en a eu plusieurs, un particulièrement à Paris lorsque jʼavais 17 ans : André FOURQUIER ce joueur jonglait littéralement avec la balle, ses reprises et arrêts de volée étaient remarquables avec un taux de réussite à 90%, il jouait au Diables Bleus de Paris. La Fédération siégeait à Bordeaux cʼétait loin de Paris il ne fut jamais sélectionné en équipe de France .
S de R : Aujourdʼhui, le Rink Hockey a beaucoup changé tant au niveau des règles de jeu que de la technique individuelle et des tactiques de jeu. Vous arrive-t-il encore dʼaller voir des matches de hockey et que pensez-vous de cette évolution? CA : Je me suis retirer en Corrèze et là le rink est totalement inconnu, pire le patinage sur roulettes en général. Je suis allé à la Roche sur Yon il y a quelques années lors des championnats dʼEurope, La règle du retour en zone était alors de rigueur, jʼai toujours trouvé cette règle incompatible avec notre sport. Huit joueurs qui tournaient en rond sur une surface de 20x20 cʼétait ridicule, ou étaient passé les belles envolées qui partaient de lʼarrière pour se terminer à toute allure sur les buts adverses !! La règle actuelle redonne un peu plus de latitude aux joueurs. Avec Internet je peux voir les matchs Espagne –Argentine et la plupart des matchs en Catalogne et là voir jouer des gars comme Pedro Gil cʼest un régal !
S de R : Paris mériterait sûrement dʼavoir une belle et grande équipe. Noisy le Grand a pris le relais de Fontenay sous Bois en première division mais nʼarrive pas encore à jouer les premiers rôles dans le championnat. Pensez-vous que notre sport saura un jour devenir un peu plus populaire ? CA : Il lʼa été à un niveau supérieur à la glace jusquʼà la seconde guerre mondiale, après ? Je ne sais que dire : incompétences au niveau fédération où les voyages et la bonne chère primait sur le développement national de notre sport. Le relationnel avec les grands médias a toujours été inexistant. Combien de reportages de nos disciplines voit-on sur France 1, France 2 aux heures dʼécoute ? Aucun et cela depuis que je connais ce sport ! Combien de patinoires spécifiques à ce sport dans Paris et dans les villes de moyennes et grandes importance ? Aucune ou très peu. Pourtant en 1956 la Coupe Latine fut organisée à Paris au VEL'D'HIV les participants et les organisateurs furent reçus par la presse qui pour une fois accompagna cette compétition. Ensuite plus rien à Paris jusqu'en novembre et avril 1984où sous la Présidence de Bernard CHARLOT furent organisés les 26ème Championnat du Monde B au stade Pierre de Coubertin et le tournoi Européen de Paris.
S de R : Aujourdʼhui vous arrive-t-il de vous retrouver avec dʼanciens coéquipiers pour parler du temps passé sur les patins ? CA : Malheureusement non, beaucoup hélas sont décédés, Je suis toujours en relation par téléphone avec Marcel SERVAN qui réside à MERIGNAC, Bernard AUDOUZE, Jean Luc BEDOUET, Bernard CHARLOT et Philippe CHAPUIS.
S de R : Auriez-vous un message à passer à tous nos jeunes qui pratiquent actuellement le rink hockey ? CA : Oui, je leur dirais quʼils ont choisi un sport formidable, méconnu certainement, mais qui procure des joies intenses ! Quʼils soient assidus aux jours et heures dʼentraînement, quʼils respectent leurs adversaires en se disant que sʼils nʼétaient pas là ils ne pourraient pas jouer, ainsi que lʼarbitre qui est indispensable même sʼil lui arrive parfois de se tromper. Et surtout je leurs dirais quʼaprès avoir bien profités de ce sport, lorsque leurs jambes et leurs bras deviendront moins rapides et quʼils arrêteront de jouer, quʼils ne disparaissent pas, mais au contraire quʼils restent pour servir ce sport afin que dʼautres jeunes connaissent les joies quʼils ont connues. Quʼils corrigent les erreurs de leurs ainés afin que le rink accède à la place qui lui est dû. Devenez dirigeants, arbitres, entraineurs*, fondez un club* comme je lʼai fait (Hockey Club du Canton de Montlhéry) et alors vous connaitrez dʼautres joies pour longtemps. *Entraineur course quelques années au Postillon Olympique Longjumellois *Hockey Club du Canton de Montlhéry.
S de R : Claude encore milles fois « MERCI » dʼavoir pris le temps de répondre à ces questions et dʼavoir bien voulu ressortir de vos tiroirs les documents et photos qui illustrent votre histoire. CA : Cʼest avec plaisir que jʼai répondu à vos questions et je vous remercie dʼavoir créé "Souvenirs sur Roulettes".
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